Le chercheur Gaston Naessens n’est plus

Photographié avec son épouse Jacinte au début des années 2000, Gaston Naessens résumait dans une de ses dernières entrevues son parcours pour le moins controversé : « Je n’ai pas peur, mais je fais attention où je mets mes pieds. Je ne veux plus me battre. Je veux seulement aider, ce qui a toujours été mon but », confiait-il en 2008. « Nous ne sommes pas contre le système médical. Si on pouvait travailler ensemble, ce serait extraordinaire. Notre produit n’a d’ailleurs rien d’incompatible avec la chimiothérapie », plaidait-il.

Fumiste pour les uns, génie pour les autres, le controversé chercheur et inventeur du 714X, Gaston Naessens, est décédé vendredi, à l’âge de 94 ans, à sa résidence de Sherbrooke. Il est décédé des complications survenues à la suite d’une pneumonie, a indiqué à La Tribune son épouse Jacinte Naessens.


Mme Naessens a raconté que le chercheur était entré à l’hôpital le 30 janvier dernier alors qu’il était aux prises avec le virus de la grippe.

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« Il est sorti de l’hôpital le 6 (février) et à partir du 8 on a commencé à voir que ça dégénérait assez vite, a indiqué l’épouse du chercheur. Il n’arrivait pas à débarrasser ses poumons du mucus qui s’était accumulé. Tout geste lui demandait un effort considérable. Ça s’est détérioré jusqu’au 15. À ce moment-là, il était dans un état semi-comateux. On savait qu’on s’en allait vers la porte de sortie… »

D’origine française, le biologiste s’était installé au Québec au milieu des années 1960 après avoir été « déporté » de France, au terme de nombreux démêlés avec la justice et les autorités médicales françaises.

Peu de temps après son arrivée au Québec, il s’installe à Rock Forest où il ouvre un laboratoire adjacent à sa résidence du chemin Mills.

Croyant avoir trouvé en Estrie un havre de paix où il pourrait poursuivre ses recherches en toute quiétude, le biologiste de formation ne tarde pas à défrayer à nouveau la manchette.

Il met au point un produit, appelé le 714X, capable selon lui de guérir des patients atteints de cancer en phase terminale. Un produit qui aurait de meilleurs effets encore s’il était administré de façon préventive, dit-il.

Arrêté par la police

Le 30 mai 1989, le chercheur est arrêté par la police à son laboratoire lors d’une opération policière filmée en direct à la télévision. La nouvelle fait rapidement le tour du monde et soulève de nombreuses réactions au sein de la population et des milieux scientifiques.

Accusé de négligence criminelle et de fraude pour avoir donné de faux espoirs de guérison à une de ses patientes, Gaston Naessens est acquitté au terme d’un procès tenu au palais de justice de Sherbrooke.
Malgré cet acquittement, il continuera d’avoir maille à partir avec l’industrie pharmaceutique ainsi qu’avec Santé Canada qui a toujours refusé d’homologuer son produit à titre de médicament.

Au sujet de son invention, Gaston Naessens disait que le 714X n’agissait pas comme un remède classique qui cible une affection particulière. Il prétendait plutôt donner une nouvelle vigueur au système immunitaire du patient et aux mécanismes de défense naturels afin que celui-ci soit en mesure de combattre des maladies dégénératives telles que le cancer.

Or, certains chercheurs n’ont pas hésité à pourfendre les prétentions du chercheur concernant la composition du 714X, en affirmant que celui-ci était composé essentiellement d’eau et de camphre.

« Nous sommes sur une liste noire parce que cela dérange énormément l’industrie pharmaceutique, avait répliqué le chercheur dans une entrevue accordée à La Tribune en 2008. Cela démolit ce qui existe déjà. 

Au lieu de prendre la vie et la remonter, d’autres préfèrent tuer ce qui n’est pas bon », ajoutait-il à l’époque.

Pas un anti-médecine

Les nombreux obstacles entourant la reconnaissance du 714X n’ont toutefois pas diminué l’ardeur du chercheur, selon Jacinte Naessens, qui est elle aussi biologiste de formation.

« C’est un être qui a toujours voulu faire comprendre que les deux médecines pourraient très bien travailler ensemble. Gaston n’était pas un anti-médecine. Il aurait tellement voulu que les deux médecines, celle qui s’occupe du corps physique, et celle qui s’occupe du système immunitaire, puissent travailler main dans la main pour arriver à une solution durable aux personnes atteintes de maladies dégénératives. »

Mme Naessens indique qu’elle entend maintenant poursuivre les activités du laboratoire fondé par son mari ainsi que la promotion du 714X

« Je vais continuer, mais je n’ai pas l’intention de faire un combat, dit-elle. Ça va se faire tout en douceur, car le momentum actuel est bon. Le momentum nous dicte qu’il faut faire quelque chose parce que les taux d’incidence de cancer augmentent actuellement, peu importe les groupes d’âge. Alors, oui la recherche va continuer, oui l’application des produits va continuer, mais ça va se faire en collaboration avec la médecine, et non pas à l’enseigne de la controverse comme Gaston Naessens a dû le porter durant les 65 dernières années de sa vie », précise-t-elle.

Depuis une dizaine d’années, Gaston Naessens s’était fait plus discret. Dans une de ses dernières entrevues, il avait résumé en ces mots son parcours pour le moins controversé : « Je n’ai pas peur, mais je fais attention où je mets mes pieds. Je ne veux plus me battre. Je veux seulement aider, ce qui a toujours été mon but », confiait-il en 2008. « Nous ne sommes pas contre le système médical. Si on pouvait travailler ensemble, ce serait extraordinaire. Notre produit n’a d’ailleurs rien d’incompatible avec la chimiothérapie », plaidait-il.